Mai 12 2011

Mikrokritik #3

Ouh, j’ai pris pas mal de retard avec tout ce que j’ai vu depuis la dernière fois… Tentons de combler le fossé par des publications plus régulières.

C’est arrivé près de chez vousC'est arrivé près de chez vous

Rémy Belvaux, André Bonzel,
Benoît Poelvoorde, 1992

Quand Poelvoorde savait montrer les dents pour mordre méchamment. Avec des potes et des moyens très limités, ils réalisent là leur premier film. On est bien loin des comédies plus ou moins réussies dans lesquelles le Belge officie désormais. Ses mimiques et gesticulations sont au service d’un humour trash du plus bel effet, dans ce vrai faux documentaire sur un tueur en série « comme tout le monde ». Ce portrait d’un tueur charismatique mais pathétique est noir et brillant. Vraiment drôle, salement incorrect, le film frappe au ventre et critique avec une justesse assez prémonitoire les dérives voyeuristes de la télévision.

Ressources humainesRessources humaines

Laurent Cantet, 1999

J’ai regardé ce film un peu par hasard : j’ai pris une grosse claque. Un regard cru, direct et tétanisant sur le monde du travail et par delà ça, les rapports humains. Frank termine ses études de commerce et vient faire un stage dans l’entreprise où travaille son père. Ce dernier à son poste, toujours le même, devant « sa » machine, pendant que le fiston est dans les bureaux, avec les patrons. Cantet filme sans effets, sans emphases. Ses acteurs sont tous amateurs (à l’exception de Frank joué par Jalil Lespert), recrutés à l’ANPE pour jouer des rôles semblables à leur fonction « dans la vraie vie ». Leur talent d’acteur est inégal, qu’importe, la vérité de leur rôle parle pour eux. Le film n’épargne personne, et critique sans manichéisme, ce qui n’est pas rien avec ce genre de sujet très politique. La scène (quasi) finale est brutale, presque insoutenable, mais sonne terriblement juste. À voir absolument.

借りぐらしのアリエッティArrietty, le petit monde des chapardeurs
[Arrietty, le petit monde des chapardeurs]

Hiromasa Yonebashi, 2010

Le dernier film d’animation des studios Ghibli sorti en salle, qui nous plonge dans le monde des chapardeurs, ces petits êtres qui vivent près des hommes et subtilisent à leur insu ce dont ils ont besoin pour vivre. Très plaisant à voir, très simple, très beau surtout avec ces décors ramenés à l’échelle des insectes. Ça fourmille de couleurs et de vie, et l’on ne s’ennuie pas une seconde. L’histoire est un poil légère quand même, mais ne boudons pas notre plaisir : Arrietty est un très joli petit film.

The Ghost WriterThe Ghost Writer

Roman Polanski, 2010

Un thriller tendu qui joue sur toute la palette des gris, un récit empli d’embruns et de nuages menaçants. Une histoire intrigante que celle de ce nègre « littéraire » (il faut préciser maintenant car sinon on est un vil raciste, limite esclavagiste) chargé, après le décès « accidentel » de son prédécesseur, de poursuivre l’écriture les mémoires d’un ancien premier ministre britannique. La grande force du film est surtout l’ambiance dans laquelle il baigne, froide, humide et oppressante, qui vous enveloppe et ne vous lâche pas. Et d’excellents acteurs pour ne rien gâcher. Prenant.

The Human CentipedeThe Human Centipede

Tom Six, 2010

Terminons sur une grosse blague, celle du mille-pattes humain. Prenez une idée a priori sympathique : un savant taré a l’idée fabuleuse de créer une chenille humaine en reliant des êtres humains entre eux en les greffant bouche contre anus (désolé si vous êtes à table). A partir de là, commencez à tourner le film, puis réalisez en fait qu’à part cette idée rigolote, vous avez oublié de faire un scénario. Continuez à tournez quand même parce que maintenant que les caméras sont chaudes ça serait con de les laissez refroidir. Meublez pendant d’interminables minutes avec du rien, ponctué parfois de trucs un peu dégueu, mais pas trop parce que vous avez aussi oublié que vous faisiez un film d’horreur. Torchez la postprod rapidos et misez sur la com’ en vendant votre merveille comme un truc ultra trash. Frottez-vous les mains d’avoir réussi à arnaquer tant de monde, et réveillez les quelques spectateurs restants à la fin de la séance.