Oct 5 2011

Délectables bruits d’Odeurs

En attendant que je récupère des photos pour poster la suite du compte rendu du Rail trip, un petit article sur un groupe que j’ai découvert hier et que j’adore déjà. Ça ne m’arrive pas si souvent d’être tout de suite conquis par un groupe, ça m’arrive encore plus rarement quand il s’agit d’un groupe français, et ça n’a jamais dû arriver quand en plus il s’est épanoui dans les années 80.

Je lisais un des rares avis dispo sur le net de Pourquoi es-tu si méchant ?, un album loufoque vaguement rock-prog à tendance bordélique d’un obscur groupe français au nom inspiré : Super Freego. L’album vaut le détour (à peu près totalement introuvable dans le commerce, heureusement qu’Internet est  là), surtout pour les trois derniers morceaux, parmi lesquels le surréaliste « Tentative de courgettes ». L’auteur de la critique signale alors :

Les textes (plus bêtes que méchants) sont en français […] et battent parfois les records de vulgarité établis par Odeurs.

« Odeurs, c’est quoi ce truc ? », me dis-je, et de cliquer conséquemment sur le lien. Après avoir lu, écarquillé les yeux d’incrédulité, je parcoure le net à la recherche d’autres infos sur cet OVNI, trouve des liens pour écouter la chose (pas mal de trucs sur Youtube, Dailymotion et autres, et Deezer et Spotify ont la discographie complète), et mazette, ce truc est exceptionnel.

Un peu d’histoire pour rapidement replacer l’animal dans son environnement naturel. Le chef d’orchestre de ce joyeux  bazar, Alain Ranval, connu sous le pseudonyme de Ramon Pipin, officiait déjà dans les années 70 avec un groupe appelé Au bonheur des dames. Je n’ai pas trop fouillé encore dans la disco de ce groupe déjà bien barré, mais tout le monde connaît leur célèbre tube « Oh les filles » :

La bande à Pipin ne se prend pas vraiment au sérieux ; avec leur maquillage et leurs costumes flashy, leur credo est de parodier la musique à la mode, le twist, pour réaliser des adaptations beaucoup plus drôles et savoureuses que les titres dont ils s’inspirent. Le groupe est polymorphe et un nombre impressionnant de musiciens y ont participé (je me marrais tout seul à lire leurs pseudonymes tous plus débiles les uns que les autres, un petit échantillon : Sergio Pontoise, Roger Rogers, Alonzo Canapelli, Hubert de la Motte Fifrée, Shitty Télaouine, César Pompidou, Eddyck Ritchell, Gépetto Ben Glabros, Gérard Manjoué…).

Suite à des désaccords, le groupe se divise en 79 et Pipin part fonder un groupe à son nom, Ramon Pipin’s Odeurs, qui deviendra Odeurs par la suite. Une bonne partie des membres d’Au bonheur des Dames rejoint le nouveau projet, qui reste dans le même esprit de déconnade, mais pousse plus loin le concept parodique en s’attaquant à des genres musicaux plus diversifiés. Les textes abordent aussi des sujets beaucoup moins politiquement corrects (leur très beau slogan est « Odeurs, à deux doigts du culte, frôle le bon goût sans jamais y sombrer »).
Comme ABDD, Odeurs est un groupe qui a vu défiler un nombre impressionnant de musiciens, parmi lesquels pas mal de pointures. Dans les noms qui m’étaient familiers, pas mal de musiciens passés par le groupe Magma, dont Bernard Paganotti, Didier Lockwood, Klaus Blasquiz ou même Stella Vander ! On trouve aussi des profils aussi différents que Manu Katché, Jacques Jakubowicz (plus connu sous le surnom de « Jacky » du club Dorothée) ou le comédien Roland Giraud. Mais la liste est loin d’être exhaustive, la tournée du second album du groupe s’est faite avec rien de moins que 38 musiciens !

Au delà de la simple parodie, avec ses brochettes d’artistes, Odeurs crée des titres sacrément réussis musicalement parlant. Ajoutés à cela l’humour pas bien éloigné de celui d’Hara-Kiri, on obtient un résultat assez magnifique. De ce que j’ai entendu, c’est leur second album, 1980 : No sex !, qui est le plus réussi et le plus diversifié. Mais leur premier est vraiment bon aussi. Une petite sélection parmi mes titres favoris :

Youpi la France, titre qui ouvre le premier album du groupe, est un pastiche des chansons niaiseuses à la Claude François :

L’homme-objet, une merveille rock aux paroles si sensuelles… Je trouve que ça fait très Dire Straits musicalement, c’est sans doute voulu.

Astrid, la meilleure chanson nécrophile que je connaisse ! Heu, en fait j’en connais pas d’autres :

Et puis terminons par Je m’aime, et son magnifique clip :

Mais ce n’est qu’un aperçu, il y a un paquet de merveilles dans le répertoire du groupe, les reprises de « Dominique » de Sœur Sourire version disco-funk ou de « I Want to Hold Your Hand » des Beatles façon marche militaire, la chansonnette époumonée par un chœur d’enfants « Le vilain petit zoziau » à la conclusion si subtile, la chanson yiddish au texte hilarant intitulé « Ma fils Tennessy », le simili duo à la Gainsbourg de « Douce crème », l’ode à « La viande de porc » ou le débile « Rock Haroun Tazieff »… Ah, et pour les fans de Magma, ne manquez pas le duo de Stella Vander et Liza Deluxe dans « Quitte ou double » : la splendide voix de Stella qui chante « Vendre mon corps pour deux fois rien/Dans un bordel de Macao/Soulageant ivrognes et marins/Puis finir dans un caniveau », c’est assez scotchant !

 

Quelques liens trouvés ici et là pour creuser un peu :

La critique de 1980 : No sex ! de Mr Prog
Un article sur le premier album du groupe sur Blogonzeureux
Un forum où l’on peut notamment trouver une liste (exhaustive ?) des membres du groupe
Un blog consacré à Au bonheur des dames et Odeurs, pas mal d’infos et les paroles des chansons
Un début d’interview de Ramon Pipin sur une page scannée de Jukebox Magazine de septembre 2005
Autre interview de Ramon Pipin
Interview vidéo d’Eddick Ritchell à propos d’Au Bonheur des Dames

Odeurs sur Deezer
Odeurs sur Spotify


Avr 4 2011

Vieux con à bord

Aujourd’hui j’ai suivi une voiture avec l’autocollant « Bébé à bord », ce qui m’a plongé dans une intense réflexion. Pourquoi décorer l’arrière de son véhicule avec cet écriteau ? Après avoir tourné le concept dans tous les sens, j’en suis arrivé à l’unique conclusion que c’était pour qu’on fasse effectivement davantage attention à l’automobile située devant nous parce qu’elle contenait un chiard.

Est-ce la version civilisée du cri de la mère épouvantée  alors que sa diligence est attaquée par des brigands, « Oh mon dieu, prenez ma brosse à dent, mon revolver, la voiture, mais vous n’aurez pas ma liberté de penser épargnez mon gosse !! » ? Les chevaux des bandits de grand chemin sont désormais sous leur capot, et ils terrorisent la veuve et l’orphelin sur l’asphalte. Grâce à ce message, le conducteur modèle espère faire un instant briller dans l’âme sombre du malandrin la flamme presque éteinte de son humanité. Lui faire comprendre que oui, il peut tuer les gens, mais alors plutôt la voiture de devant là, c’est un connard, il a pas de mouflet, je crois même qu’il est pas marié !!!

Je pense que cet avertissement doit aussi être une déclinaison du prototype de la future maman qui avance fièrement son ventre rond à la caisse du supermarché, ou de celle qui a déjà délesté dans une poussette le fruit de ses entrailles, avec des airs de « Excusez-moi mais laissez passer, je suis la déesse mère, je procrée pour la France ». « Bébé à bord », c’est un peu ça également, un côté « Hey, t’as vu, j’ai des gosses et pas toi, loser ! ».

Char bébé à bord

Il n'avait pas son autocollant "Bébé à bord".

Moi je trouve ça un peu dégueulasse pour ceux qui n’ont pas de progéniture et qu’on peut par conséquent envoyer joyeusement faire des tonneaux par dessus la rambarde de sécurité. J’attends donc avec impatience la commercialisation d’une palette plus large de ces autocollants, qui permettraient ainsi la mise en lumière d’autres qualités des occupants de l’habitacle, comme par exemple « Bac + 5 à bord », « Bac + 2 à bord ouais je sais c’est pas non plus incroyable mais j’ai été malade », « Normalien à bord », « A fait demi-finaliste à la Star Ac’ à bord », « Mille millions de mille s’à bord », « Bon français à bord », ou même « A voté Sarkozy à bord » (quoique ce dernier intitulé pourrait être la cause de davantage d’accidents qu’un gage supplémentaire de sécurité).
Ainsi, un beau matin, quand Monsieur Martin décidera que tiens, aujourd’hui, il va avoir un accident avec sa voiture, il pourra choisir avec plus de discernement qui il va faire périr dans d’atroces souffrances : « Ah flute, lui c’est un « Boucher-charcutier à bord », ça m’emmerderait quand même de le tuer, j’adore les rillettes. Ah par contre lui c’est un « Propriétaire de petit chien qui pue à bord », j’vais m’le faire, ça me vengera du voisin de palier qui me fait chier tous les matins avec son teckel ! ».

Quand j’aurai 80 balais, je collerai un carré « Vieux con à bord » sur ma lunette arrière. Handicapé par ma mauvaise vue et mes réflexes hésitants, j’emmerderai les jeunes à rouler à 30 à l’heure sur les routes dans ma vieille voiture électrique (la voiture électrique sera dépassée en 2037, remplacée massivement par un véhicule moderne roulant au gaz hydro-végétal de jus de pâquerettes, supra-écolo, ne rejetant dans l’atmosphère que de la vapeur d’eau, des effluves de fleurs et des rossignols : comme ça sera bien le futur !). Je prendrai ainsi ma revanche sur les anciens de mon époque qui roulent toujours au pas, sans doute pour moins user les pneus (les vieux sont radins, c’est connu), toujours sur les routes où on peut pas doubler. Grâce à cette flambante étiquette, je fournirai à ceux qui me collent au train la possibilité de s’énerver avec raison (« Putain il avance pas devant !! Je parie que c’est encore un vieux !! – Oui c’est marqué, regarde ! ») et leur ferai goûter mon sens de l’autodérision, pendant que je savourerai avec délice mon doigt d’honneur à leur insolente jeunesse.


Déc 21 2010

Daniel Racha de Crédi

Sur ma note sur Alain Delon, un homme probablement très sage a posté le commentaire suivant, mais une méprise a entraîné sa mise à l’écart :

Il semble que vous soyez un expert dans ce domaine, vos remarques sont tres interessantes, merci.

– Daniel

Avant toute chose, merci à vous, cher Daniel. Je ne peux que vous retourner le compliment, vos remarques sont également très intéressantes. J’ai beaucoup aimé en particulier le passage où vous disiez que j’étais un expert et que mes remarques étaient très intéressantes (enfin je  résume évidemment, vous le disiez beaucoup mieux que moi).

Malheureusement, le service anti-spam de ce site, répondant au nom d’Akismet, n’a pas apprécié votre avis sur la question et l’a purement et simplement classé comme commentaire indésirable. Sachez bien Monsieur que, contrairement à beaucoup de monde, ce n’est pas du tout dans ma nature de censurer les gens qui sont du même avis que moi. L’affaire n’en restera pas là. J’ai aussitôt demandé à m’entretenir avec M. Akismet pour laver au plus vite cet affront qui me déshonore.
Il est possible que le brave homme, qui passe beaucoup de son temps sur les blogs où on l’embauche à supprimer à la main les propos inconvenants, ait pu commettre une bévue et modérer votre commentaire par inadvertance. Mais enfin ce n’est pas une raison : avant toute intervention sur un site, quel qu’il soit, je pense que la moindre des choses est d’envoyer une lettre recommandée au responsable dudit site, ou au moins de le contacter par un appel téléphonique lui permettant d’expliquer calmement les raisons de l’intervention.

Notez que s’il s’agit d’un acte volontaire,  je peux tenter d’appréhender le raisonnement qui dut traverser l’esprit de ce subalterne : vous avez choisi, sans doute par fantaisie de l’esprit, d’écrire le nom de la grande famille dont vous êtes issu, les Racha de Crédi (qui, en France, n’ a pas entendu parler d’un seul de vos illustres ancêtres ?) sous une graphie peu commune : rachat de crédit. Évidemment, l’esprit efficace mais quelque peu scolaire (vous savez comment sont les fonctionnaires…) de M. Akismet aura tiré des conclusions hâtives, vous mettant au rebut sans autre forme de procès. Il est vrai que vous aviez poussé l’art du mimétisme jusqu’à fournir un véritable site de rachat de crédit comme votre site internet, et votre adresse e-mail pouvait également laisser sceptique l’œil non expert.
Sans ma vigilance accrue et ma connaissance sans faille des grands de ce monde, nous aurions frôlé l’incident diplomatique.

Soyez donc assuré de toute ma considération et sachez que je fais tout mon possible pour régler cette affaire au plus vite. Dans cette attente, et afin de réparer cette faute, je tiens personnellement à vous convier au prochain dîner qui se tiendra à mon domicile mercredi en huit. Vous verrez, nous en reparlerons avec mes grands amis Georges Viagrat et Eugène Largioure-Penisse, nous finirons par en rire.