Rail trip, part 10

Nous quittons aujourd’hui le Sziget et la Hongrie, cap sur la Croatie !

Lundi 15 août

Réveil à 7h. Douloureux. On finit de boucler les sacs, de plier les tentes. La tente de Ben et Ogero est couverte d’inscriptions de gens qui ont indiqué leur ville sur la toile. Chouette souvenir. Bye bye aux voisines qui elles aussi reprennent la route. Sac sur le dos, on n’avait pas connu ça depuis un moment.
Le Sziget s’est déjà vidé, partout des tentes ont disparu, laissant derrière elles des carrés d’herbe jaunie. On trouve un bus qui fait gratuitement la navette pour les festivaliers jusqu’à la gare de Budapest-Keleti [gare de l’est], d’où on prend un métro pour rejoindre Budapest-Déli [gare  du sud].

On avait prévu large et sous-estimé nos facultés d’orientation, notre train part dans trois heures… On en profite pour tenter de réserver nos billets pour la dernière portion de notre périple ferroviaire, en vain. Impossible de réserver une place dans un train express italien depuis la Hongrie, vachement pratique. Bouffe de merde en gare, ça commence à devenir pesant. Wanted sur le sol de la gare. On monte enfin dans le train. Notre wagon est squatté par d’autres interrailleurs qui n’ont pas réservé de place. Ça gueule. On prend leurs places (qui sont les nôtres) après médiation du contrôleur, ils voyageront finalement dans le couloir, le train étant bondé [j’ai un peu de scrupules vis-à-vis d’eux, mais bon, ça ne me semblait pas beaucoup plus juste qu’on ne puisse pas s’asseoir après avoir réservé des places]. Dans la cabine pour six personnes, on manque clairement de place et il fait surtout une chaleur à crever. Pas un souffle d’air. On sue, on est crados. Le train n’avance pas bien vite. On longe le lac Balaton, paraît-il très beau, mais on n’en voit pas grand chose. On reste coincés un bon bout temps à la frontière croate, contrôle des papiers tatillons [était-ce parce qu’on quittait l’Union européenne ou y avait-il un problème particulier dans le train ?]. Hasard totalement improbable : alors qu’on poireaute à la frontière, mon frère se penche à la fenêtre et aperçoit un de nos cousins qui était aussi au Sziget et voyage sur le même train. Pas vraiment le temps de parler, il doit remonter dans son wagon. On pensait le recroiser à l’arrivée du train, mais on n’arrivera finalement pas à se retrouver. Tant pis, on se contactera au retour pour se raconter nos routes croisées. Le train a fini par repartir. Le jour décline et la température dans la cabine devient enfin plus vivable. Les gars fument à la fenêtre du train en marche. Le voyage devient enfin plus supportable. Et finalement, arrivée à Zagreb, avec plus d’une heure de retard. Les potes de mon frère qui nous attendent depuis un moment ont l’air cools. Guillaume a connu Luka lors de son voyage Erasmus à Édimbourg. Avec lui quelques potes : Buda, Tamara et Daria. Après avoir retiré quelques kunas au distributeur du coin, on mange un kebab (typique…) en speed, histoire d’oublier qu’on n’a rien avalé depuis le midi, puis on file à un petit bar local bondé. L’endroit semble être un point de ralliement de la jeunesse de la ville. Daria nous apprend que l’endroit a récemment déménagé ici après avoir fermé tout un moment. Il faut croire que l’endroit n’a rien perdu de son attrait dans le déménagement. Pourtant rien de spécial dans ce bar, si ce ne sont ces dizaines de tables en extérieur, toutes prises d’assaut par les autochtones. On se pose par terre (pas vraiment comme si on risquait de se salir) et l’on est initiés aux bières locales. Retenons la fameuse « Žuja » (prononcer « jouya »), abréviation d’Ožujsko, une bière bon marché qu’il convient paraît-il de commander déjà ivre mort, quand on ne fait plus trop attention à sa qualité qui laisse à désirer. Pas dégueu cependant, mais il paraît qu’elle donne mal au crâne. Il existe une déclinaison au citron dont le goût rappelle fortement celui du Gini.

Ben, qui a les pieds en compote, Léo et moi accusons le coup, l’unique heure de sommeil de la veille se fait sentir. Je peine à garder les yeux ouverts et à me concentrer sur la conversation. Daria nous propose d’aller dormir chez elle, on accepte volontiers, les autres iront dormir chez Tamara, Luka et Buda. Daria vit chez ses parents (partis en vacances) avec son copain et sa sœur. Elle a du coup un grand appartement où elle nous accueille à bras ouverts. Douche rapide et salvatrice, puis une nuit sur des lits et canapés qui n’ont rien à voir avec nos minces matelas gonflables. On avait presque oublié ce qu’était le silence. On s’endort en deux secondes, bonheur.

Le train bondé vers ZagrebOzujsko la boisson des champions

 

 

 

 

 

 

 

Mardi 16 août

Un réveil un peu brutal à 7h50 par des bruits de travaux à l’étage du dessus. Peu importe, on a merveilleusement dormi. Daria est déjà levée, son copain est parti bosser. Le reste de la bande doit nous rejoindre à 10h pour prendre un petit déj préparé par Léo, notre cuistot attitré qui se languit depuis un moment de ne pas avoir pu s’activer aux fourneaux. On va faire les courses en bas de l’immeuble, dans une supérette qui donne sur un petit parc qui sert aussi d’aire de jeux pour les gosses du coin. Léo veut faire du pain perdu avec de la brioche, mais difficile de trouver quelque chose qui y ressemble.  On trouve quand même des petits pains qui feront l’affaire.
En attendant tout le monde (en retard, comme il se doit), on tape la causette avec Daria en tentant de résoudre un Rubik’s Cube qui l’occupe depuis un moment. Moi qui avais appris une méthode pour le résoudre il y a quelques mois, je suis incapable de me souvenir des combinaisons. Foutu cube à facettes. Daria nous fait goûter des éléments constitutifs du petit déj croate : turkish coffee qu’elle peine à préparer (plus habituée au café soluble) et une sorte de jus d’orange en poudre dilué dans de la flotte. Paraît que c’est très bon pour évacuer le mal de crâne des soirées trop arrosées. Ça nous rappelle le médoc soluble en sachet qu’on prenait étant petit (mon frère dira plus tard autour de la table : Exomuc, je lui fais confiance il en connaît un rayon). Pour les plus vieux, ce jus d’orange chimique doit être l’équivalent du Tang que je n’ai connu que part ouï-dire. C’est un peu dégueu mais le vague côté madeleine de Proust fait facilement finir le verre.
Tout le monde finit par arriver, ça papote sec autour de l’excellent pain perdu sauce au chocolat du cuistot. On part visiter Zagreb en compagnie de nos guides locaux. On n’a pas beaucoup de temps : à Zagreb, notre groupe se scinde en deux, la moitié rentre vers la France en repassant par l’Allemagne et Mayence où mon frère tient à voir une autre de ses connaissances, l’autre moitié, dont je fais partie, fait un arrêt à Venise avant de remonter sur la Belgique où l’on se retrouvera pour rentrer en France en voiture. Notre train ne quitte la capitale croate qu’à 23h50, mais le leur est à 18h15.
Balade dans Zagreb, on est contents d’être accompagnés de personnes du coin sans quoi on manquerait sans doute des ruelles sympathiques. La ville est assez hétéroclite architecturalement parlant, pas vraiment magnifique de ce qu’on a pu en voir mais qui a néanmoins du charme. Après quelques pérégrinations (et quelques restos fermés), on s’arrête manger dans une petite brasserie. Dégustation d’un plat local dont j’ai oublié le nom, fait de boulettes de viande et de pommes de terre grillées. Fort bon. Les gars commencent à s’inquiéter pour leur train (il était 16h et des brouettes quand on s’est mis à table). On s’arrête sur le chemin chez un disquaire, les Croates nous achètent pour déconner un disque de Mišo Kovač, star locale ultra populaire et assez ringarde. Voilà qui bercera notre voyage en voiture de retour en France.
Le train arrive en gare, photo souvenir devant le wagon avec les Croates. Bizarre de se séparer ici après tout ce temps passé ensemble, même si finalement on se revoit dans trois jours. Vrais faux adieux déchirants avec mouchoirs en papier. Ben, Pierre et moi avons donc plusieurs heures devant nous pour profiter de la soirée avec nos hôtes. Arrêt au stand ravitaillement alors qu’on retourne vers le centre ville. Ils achètent du vin bas de gamme et du coca. De la même façon qu’ils mettent fréquemment de l’eau dans leur vin (souvent dégueu, à leur décharge), on apprend horrifiés que le mélange vin-coca est fort apprécié.

On remonte sur les hauteurs de la ville, dans une rue aux allures de faux Montmartre, avec éclairages chaleureux et musique douce. Un petit groupe local joue paraît-il ici tous les soirs à partir de 21h. On l’entendra par intermittence, comme si le groupe jouait un morceau, puis allait boire un coup, avant de revenir une heure après pour en jouer un autre. Evidemment, on goûte le vin (grand cru de piquette) et le mélange vin-coca (curieusement au début ça semble buvable, mais l’arrière-goût âpre de débouche-évier évite de nous faire aller plus loin que deux ou trois gorgées). Soirée tranquille et appréciable après notre piètre prestation de la veille, l’impression de vivre un peu comme vivent les jeunes Croates au quotidien, loin du voyage-type du touriste lambda. Il fait très bon, très doux, sensation un peu oubliée après les hauts et bas un peu extrêmes des températures de Budapest. Vers 22h30 on lève le camp, arrêt dans une petite boutique locale pour acheter une « burek » [j’arrivais pas à me relire, merci à Daria de m’avoir rappelé le nom !], sorte de spécialité turque adoptée par la ville [apparemment d’après Wikipedia c’est assez populaire dans toute une partie de l’Europe de l’est] qui se compose de viande hachée dans quelque chose qui ressemble à de la pâte feuilletée. C’est assez bourratif mais pas mauvais. Arrivés à la gare, mauvaise nouvelle : notre train a plus d’une heure de retard. On se pose sur l’herbe dans le parc face à la gare, tout en continuant nos discussions sur tout et un peu n’importe quoi, nos amis Croates semblent commencer à être un peu bourrés avec leur breuvage infâme. J’apprends que le blason à damier croate doit toujours commencer par une case rouge, l’inverse étant un symbole utilisée par l’extrême-droite nationaliste. Discussion à propos du premier roi du pays [Tomislav Ier de Croatie], dont la statue équestre trône au dessus de nous et dont l’histoire serait en grande partie mythifiée. Quelques clodos viennent taper la causette, assez marrant. On se déplace à l’intérieur de la gare où déjà beaucoup de monde attend, allongé tant bien que mal sur les quais. Il y a une sorte de chapelle ouverte le long du quai, très curieux. Sans doute pour prier pour que les trains n’arrivent pas avec davantage de retard…
Finalement, à une heure du matin passé, notre train arrive, un vieux machin dans le style du précédent, joie. Adieux aux allures d’à bientôt (somewhere in France maybe) à nos courageux camarades qui ont tenu à attendre avec nous jusqu’au bout. Notre escale à Zagreb aura été de courte durée mais riche en bons souvenirs.

Une petite place dans ZagrebUne ruelle animée vraiment très agréableZagrebVerdureMontmartre in ZagrebZinedin Zidan