Rail trip, part 5
Nous voici à Bratislava, pour un séjour encore plus bref qu’à Prague et Vienne, mais tout aussi mémorable. Ah, au passage, j’ai enfin pris le temps d’ajouter quelques photos sur les articles, allez jetez un œil !
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Samedi 6 août
On n’avait pas vraiment prévu de visiter Bratislava (Bratislavia selon Léo) dans les plans initiaux, mais finalement on décide d’y passer la journée du samedi. On tente de profiter de la matinée sur Vienne que l’on a trop survolée comparé à tout ce qu’il y avait à y voir, mais suite à quelques merdouilles avec le bus, on arrive tard à la gare où l’on pensait laisser nos sacs. Plutôt qu’un retour express dans la capitale autrichienne, on part un peu plus tôt que prévu pour Bratislava (il y a pas mal de trains, les deux capitales étant distantes de 60 kilomètres seulement).
Arrivés sur place, on se met à la recherche d’une auberge de jeunesse, n’ayant pas vraiment préparé le terrain. Après quelques errances, on en trouve une qui nous fait la nuit à 15€ et des brouettes, cher, comme partout dans la ville en ce qui concerne le logement. Les locaux valent le détour cependant : passé le hall flambant neuf, l’arrière boutique est assez rustique : ascenseur sans porte de protection (on peut toucher les portes et les murs des différents étages en montant), chambres d’étudiants assez roots avec tapisseries diverses sur un même mur, chaises d’un autre âge, douches en kit. D’une façon générale, aucune unité d’ensemble, chaque chambre est différente, sans doute plus ou moins bricolée avec le matériel dispo. En somme, génial et parfait pour une nuit.
Une fois les sacs posés, direction le centre ville. Les faubourgs de Bratislava ont des allures de ville fantôme. Est-ce parce qu’on est samedi, en plein mois d’août, qu’il fait plutôt très chaud, ou est-ce une situation habituelle ? Des maisons abandonnées en ruine, des terrains vagues derrière des grilles rouillées ou des portes vermoulues, pour empêcher d’entrer ou de voir ce qui se cache derrière. À côté de ça, quelques îlots de vie, des voitures modernes éparses, qui contrastent avec les tramways-bus sur roues. Nombre de bâtiments rappellent le passé communiste récent.
On pense trouver plus d’activité en centre ville, mais le résultat n’est pas vraiment concluant. Reste les ruelles pleines de charme et de vieilles pierres. On finit par tomber sur une allée piétonne avec de la verdure et des fontaines et où enfin, ça bouge. Pas mal d’activités de plein air : des types jouent aux échecs sur un échiquier géant, plus loin une scène avec des danses traditionnelles, ici un concert au public exclusivement troisième âge, venu écouter une chanteuse qui chante plutôt bien, presque comme Piaf et à peu près en français. Assez marrant et sympa à écouter.
Pause désaltérante dans un pub irlandais (typique, donc), plutôt vide. Consolation sur le pichet de 1 litre à 3€ [ça faisait longtemps que j’avais pas parlé bière, hein ?]. Nouvelle petite promenade avant de manger, les rues du centre s’animent peu à peu. La température devient parfaite, l’ambiance également. Resto sympa, malgré un serveur assez peu affable. 40€ pour six, et ce en trouvant le moyen de nous faire arnaquer avec des plats facturés en double. À noter aussi qu’on goûte le vin local, et pour une fois qu’on trouve un pays un tant soit peu viticole, le résultat n’est pas terrible… On retourne au pub qui s’est rempli et animé. Les rues aussi se peuplent, les gens s’installent aux terrasses. Bratislava s’éveille à la tombée de la nuit.
Dans le pub, un groupe de personnes jouent sur une petite scène improvisée des chansons que l’on suppose slovaques en s’accompagnant à la guitare. Ils se passent les instruments, garçons et filles se relaient derrière le micro. On se trouve une table plus proche de la scène. Les chants slovaques laissent place à des classiques du rock revisités en acoustique sur ces guitares maîtrisées de façon experte. Il nous semble que les musiciens puisent l’inspiration dans le public, alors on participe : on souffle des titres au chanteur qui transmet au musicien, ou l’inverse. Ils semblent connaître les paroles de tous les standards du genre, réinterprétant les mélodies à leur sauce pour un résultat magnifique. On se croit hors du temps, dans cette bulle festive et chaleureuse, dans ce bar perdu à l’autre bout de l’Europe. Je glisse à l’un des chanteurs, venu s’asseoir à la table voisine : « Could you play a Doors song? You know, the Doors… – I don’t know… we have have no keyboard ». Quelques minutes plus tard, il remonte sur scène, et la petite troupe enchaîne avec Break on Through et trois autres titres du répertoire du groupe de Morrison. Bonheur. Layla de Clapton, Hotel California, Ain’t no Sunshine de Bill Withers, Pink Floyd et son Wish You Were Here… On n’est pas loin de la crampe des zygomatiques à force de sourire béatement d’admiration. Ils jouent depuis des heures et leur plaisir communicatif infuse par tous les pores de la peau.
Quand enfin ils cessent de jouer, on prend plaisir à aller parler avec eux, de leur vie, à Bratislava et ailleurs, de la nôtre, en France, ici, et demain là-bas. Je m’attarde à discuter avec la si jolie chanteuse, je glane des autographes du groupe qui semble presque gêné de tant de reconnaissance. Je quitte le bar un peu trop ivre, un peu trop amoureux et un peu trop heureux pour avoir franchement envie d’aller dormir la poignée d’heures qui nous sépare du réveil-matin sonnant le départ pour Budapest. Ain’t no sunshine when she’s gone, Bill Withers a bien raison.
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